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Dodie
17 décembre 2007

Chers professeurs...

Vendredi dernier avait lieu la réunion entre les profs de CPGE et les impitoyables membres du jury du concours de l'ENS-LSH... Cette journée a une saveur assez particulière dans la vie de l'école...

Déjà, *en théorie*, la journée est banalisée, mais la théorie est très théorique chez nous, aussi ai-je eu ma matinée de cours habituelle.


Néanmoins, cette journée reste spéciale! En effet, venus de Paris et de province, des dizaines de nos anciens et bien-aimés (ou pas) professeurs quittent le bureau de leur salle de classe pour venir en une longue procession de têtes savantes et pédagogues (ou pas) écouter les recommandations annuelles du jury afin de les prodiguer à leurs élèves ébahis comme les clefs de la réussite au concours d'entrée (ou pas).

Cette présence soudaine et éphémère de tant de représentants de leur ancienne vie de khâgneux provoque chez les Normaliens une émotion que vous ne pouvez imaginez! Ils se trouvent partagés entre leur admiration pour ces professeurs semi-divins qui ont instillé pendant deux ans (voire trois pour les chanceux cubes) dans leur cerveau ignorant la savante liqueur de la connaissance et sans lesquels ils n'auraient jamais pu franchir la grandiose porte de l'Ecole Normale Supérieure - partagés donc, disais-je, entre cette admiration pleine de "religio" et leur haine profonde pour ces prof qui les ont fait lever de si bonne heure le samedi matin pour des dissert de 5h, leur ont infligé des concours blancs juste avant Noël, leur ont rendu des sales notes et les ont collés le mercredi après-midi....
Mais en général, l'admiration l'emporte! (sauf envers les profs qui font l'unanimité des élèves... contre eux!)

Et les doctes professeurs, quant à eux, sont plein de tendresse et de fierté envers ceux qui sont en quelque sorte leurs "chères têtes blondes", pour ces petits pleins de promesses qu'ils ont contribués à faire pousser et embellir afin d'en faire de parfaits petits normaliens classés dans les 36 premiers : ils sont leur chef d'oeuvre, leur fierté, et ils les exhibent avec emphase et emotion devant les petits khagneux émerveillés ou devant des collègues sceptiques que d'autres élèves que les leurs aient pu majorer le concours.

Et professeurs et élèves, tous émus et réunis dans cette grande communion de la connaissance classique, académique et norm-alienne errent dans le hall d'entrée de l'école à la recherche pour les uns de leur ancien disciple, pour les autres de leur ancien maître. Ca a quelque chose des manchots sur la banquise, après de longs jours de pêche... Chacun cherche désespéremment du regard celui qu'il attend : les groupes d'élèves se défont quand l'un d'entre eux aperçoit son bien-aimé professeur. Parfois, scène ô combien douloureuse, une âme en peine, élève ou professeur, erre seule au milieu de ces groupes joyeusement réunis, sans parvenir à trouver son complément, jusqu'au moment où, une fois le hall vidé, cette âme se dise, si c'est celle d'un professeur "quel manque de reconnaissance!" et si c'est un élève "quel manque de professionnalisme!".

Moi l'an dernier, j'errais comme une âme en peine en espérant voir mon prof de lettres, et je voyais une prof errer comme une âme en peine en cherchant des élèves... j'ai failli lui dire qu'on pouvait toujours faire mine de se retrouver, histoire de participer à la ferveur commune, puis, finalement, je l'ai pas fait....

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Commentaires
O
Vu de l'intérieur, ça n'a pas du tout la même allure. J'imagine très bien ma Bacchante de prof de français en manchot solitaire. Et le poulailler que la discussion sur l'option philo a dû susciter...
Dodie
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